dimanche 12 juin 2011

Actes sexuels: la Cour suprême tranche


Par Stéphanie Marin, La Presse Canadienne, thecanadianpress.com, Mis à jour le: 27 mai 2011 05:06

OTTAWA - Jetant un œil dans les chambres à coucher de la nation, la Cour suprême du Canada, dans une décision partagée 6-3, a décidé que des adultes ne peuvent consentir à l’avance à certaines activités sexuelles.
Dans un surprenant cas d’asphyxie érotique, le plus haut tribunal du pays a jugé qu’une personne ne peut donner son accord au préalable à des actes sexuels qui auront lieu lorsqu’elle sera inconsciente.
Car il faut qu'une personne puisse dire «non» et demander à tout moment que l'acte sexuel cesse, ce qui est impossible si la personne a perdu conscience, a tranché la majorité de la Cour dans sa décision rendue vendredi.
Les six juges refusent l'idée qu'une personne puisse donner à l'avance un consentement général à toute une gamme d'activités.
La Cour suprême se trouve ainsi à préciser que sont illégaux tous les actes sexuels qui se déroulent lorsqu’une personne est inconsciente, notamment suite à l’asphyxie érotique, et cela, même si elle y a librement consenti.
Les juges voulaient éviter de modifier les règles du Code criminel sur le consentement, afin de protéger les victimes potentielles.
«C'est pour prévenir l'exploitation sexuelle des hommes et des femmes et pour assurer aux personnes qui se livrent à une activité sexuelle la possibilité de demander à leur partenaire de cesser à tout moment que le législateur requiert un consentement conscient de tous les instants», a écrit la juge en chef Beverley McLachlin.
Le jugement va aussi avoir un impact important pour les cas d'agression sexuelle sur des personnes intoxiquées par l'alcool ou la drogue au point de perdre connaissance.
L’affaire a débuté lorsqu’une femme d’Ottawa a accusé en 2007 son conjoint de fait d’agression sexuelle.
Elle avait admis avoir consenti à un jeu érotique, et était d’accord pour que son partenaire la ligote et l’étrangle au point de la rendre inconsciente. Mais elle n’aurait pas consenti à se faire sodomiser avec un godemichet alors qu’elle était évanouie.
Elle avait ensuite révoqué sa version des faits, soutenant avoir menti et uniquement porté plainte pour empêcher son conjoint de fait de demander la garde exclusive de leur enfant.
L’homme qui était son conjoint depuis plusieurs années avait d’abord été condamné à 18 mois de prison pour agression sexuelle et bris de probation.
Il avait par contre été acquitté par la Cour d’appel de l’Ontario, qui estimait que les deux partenaires avaient établi des règles claires pour leurs jeux. Et que la femme avait donné son accord aux activités sexuelles en sachant qu’elle ne pourrait révoquer son consentement une fois inconsciente. Rien n’indiquait non plus qu’elle avait changé d’idée.
La Cour suprême a rétabli la condamnation. Elle juge qu’en matière criminelle, il faut qu’une personne donne un consentement réel et actif à chaque étape de l’activité sexuelle.
Mais les trois juges dissidents estiment que les règles établies par le Code criminel n’ont pas pour objectif de limiter le droit d’adultes consentants à donner leur accord à des actes sexuels privés qui ne causent pas de lésions corporelles. Et qui n’outrepassent pas les limites du consentement donné librement.
«Les dispositions du Code criminel relatives au consentement à l'activité sexuelle (...) visaient à protéger les femmes des abus commis par d'autres, et non à les protéger contre elles-mêmes en restreignant leur liberté de choisir, en toute autonomie, quand, comment et avec qui elles auront des rapports sexuels», a écrit le juge dissident Morris Fish.
«Autrement dit, ces règles ont pour objet de protéger et de favoriser l'autonomie sexuelle des femmes, et non de faire des choix à leur place».
De la foutaise, estime Elizabeth Sheehy du Fonds d'action et d'éducation juridique pour les femmes.
«Cela ferait une moquerie de ce que nous considérons comme étant un consentement valide, qui doit être actif, continu et conscient», juge-t-elle.
Elle qualifie la décision de victoire pour la sécurité des femmes.
«Cela envoie un message clair qu'une femme qui est inconsciente n'est pas sexuellement disponible», dit-elle.
SOURCE : http://actualites.ca.msn.com/national/actes-sexuels-la-cour-supr%c3%aame-tranche

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